Syndrome du canal carpien



L'ETIOLOGIE


Le syndrome du canal carpien est lié à la compression du nerf médian au poignet responsable de la sensibilité du pouce et des 2 ou 3 doigts voisins, et qui commande les muscles de la base du pouce.
le "canal carpien". est en fait un tunnel formé en arrière par les petits osselets du carpe, qui ont la forme d'une gouttière ; cette gouttière est fermée en avant par un ligament très épais, le "ligament annulaire antérieur du carpe".

Le syndrome du canal carpien est lié soit à une rétraction du ligament antérieur (contenant), soit le plus souvent à une augmentation de volume des tendons fléchisseurs (synovite du contenu).

Cela ayant pour conséquence une compression et une perte progressive de la conduction du nerf médian. A un stade ultime, la compression chronique du nerf peut finir par le laminer et le détruire complètement, de façon irréversible.


Canal carpien - Contenant
- Annulaire antérieure - Ligaments, tunnel osto-fibreux


Canal carpien - Contenu
- Nerf médian, Gaine synoviale


LES SIGNES CLINIQUES


Le syndrome du canal carpien est très fréquent touche le plus souvent la femme, à partir de la quarantaine, mais n'est pas exceptionnel chez l'homme.

Les symptomes sont le plus souvent des engourdissements et des picotements survenant LA NUIT ou le matin, puis de véritables douleurs à la main, avec souvent des irradiations vers l'avant-bras, le coude ou même l'épaule.

Ces signes peuvent toucher un seul doigt ou plusieurs doigts, mais ils épargnent habituellement le petit doigt.

Ces signes amènent généralement à consulter après quelques semaines ou quelques mois d'évolution.

En l'absence de diagnostic précoce, une ANESTHéSIE progressive apparaît lors des prises fines de la vie courante (boutonner les vêtements, coudre, ramasser les petits objets, etc.) et une PARALYSIE des muscles de la base du pouce qui "fondent".


LE DIAGNOSTIC


L'examen du médecin recherche – le plus souvent sans les trouver - des signes d'insensibilité des pulpes du pouce et des doigts, ainsi que des signes de paralysie et de fonte musculaire à la base du pouce. Il peut aussi rechercher à reproduire les signes sensitifs par des manœuvres spéciales.

Un électromyogramme (EMG) est le plus souvent prescrit pour confirmer le diagnostic en retrouvant un ralentissement de la vitesse de conduction du nerf médian au canal carpien. Il permet aussi de chiffre l'importance de ce ralentissement. Il permet enfin de rechercher une atteinte associée d'un autre nerf sensitif de la main (le nerf cubital), et de rechercher une éventuelle atteinte du nerf médian à un autre niveau. Une atteinte "à double étage" est en effet possible, en particulier en cas d'arthrose cervicale.
Des radiographies du poignet, du cou peuvent être demandées.


LE TRAITEMENT


Trois possibilités :

Ne rien faire, et observer l'évolution sous couvert d'un traitement anti inflammayoire. C'est le plus souvent ce qu'il faut faire lorsque les signes ont débuté depuis quelques semaines, sans paralysie du pouce ni baisse de la sensibilité des doigts, et que la gêne reste supportable.
Les signes peuvent en effet s'atténuer ou disparaître après un traitement de quelques jours pendant plusieurs mois ou années, et il n'est donc pas utile d'opérer systématiquement.

Faire des infiltrations de corticostéroïdes au poignet, autour du nerf médian. C'est ce qu'on peut proposer si les douleurs sont importantes et que les signes ont débuté depuis moins d'un an. Ces infiltrations sont habituellement faites par les médecins rhumatologues.
Les infiltrations entrainant une réduction de l'inflammation des tendons et de leur volume soulagent dans 80% des cas les douleurs pendant quelques semaines. La réponse à l'infiltration confirme encore le diagnostic dans certains cas de doute, et permet de prévoir avec une grande probabilité l'efficacité du traitement chirurgical
3 infiltrations semblent un maximum à ne pas dépasser pour éviter d'atrophier et de fragiliser les tendons autour du nerf.

Opérer. L'intervention chirurgicale est indiquée lorsque les signes évoluent depuis plus d'un an, que les signes sensitifs deviennent permanents ou s'aggravent, ou qu'il existe des signes moteurs ou sensitifs objectifs, ou que les signes de compression sont évolués sur l'électromyogramme, ou que les signes sensitifs réapparaissent après une ou deux infiltrations.


L'INTERVENTION


L'intervention a pour but de décomprimer le nerf médian en sectionnant le ligament épais qui le recouvre. Il existe 2 façons de pratiquer cette décompression : la méthode classique, par une incision cutanée de 3 cm environ sur le talon de la paume, et la méthode endoscopique, par une ou deux incisions de 1 cm environ au poignet et à la paume. Si cette dernière méthode est en apparence plus séduisante, elle n'a pour l'instant pas fait la preuve de sa supériorité réelle sur la méthode classique, et il est démontré au contraire qu'elle présente plus de risques de blessure nerveuse. Le choix est fonction du chirurgien et des signes objectifs (synovite).

Sur le plan anesthèsique cette intervention est faite (98% des cas) sous anesthésie loco régionale (bloc plexique), avec un garrot pneumatique gonflé au bras pour éviter les saignements. Il s'agit simplement de libérer le nerf médian de sa compression en sectionnant complètement le ligament annulaire antérieur du carpe puis de nettoyer si nécessaire les tendons fléchisseurs des doigts épaissis (synovectomie).


Canal carpien - ncision cutanée, pli d'opposition du pouce
- Incision cutanée, pli d'opposition du pouce


Canal carpien - Interventions sur le nerf médian
- Nerf médian


LES SUITES DE L'INTERVENTION


L'hospitalisation ne dure généralement que quelques heures, le patient étant hospitalisé le matin et sortant le soir même ("hôpital de jour"). Mais certaines circonstances peuvent conduire à proposer une hospitalisation conventionnelle, de une à deux nuits.
Dans les quelques jours qui suivent l'intervention, les signes sensitifs des doigts qui avaient motivé l'intervention ont généralement disparu, de façon définitive. Il existe cependant une autre douleur, qui est liée à l'intervention et qui siège au talon de la main. Habituellement maximum le premier jour, elle est calmée par les antalgiques et une activité réduite de la main opérée.

La première semaine après l'intervention. Il est recommandé de placer la main au-dessus du niveau du cœur (soit sur un oreiller lorsqu'on est allongé, soit sur l'épaule opposée lorsqu'on est assis ou debout). D'autre part, et afin d'éviter un engourdissement, il est recommandé une ou deux fois par heure de lever la main très haut au-dessus de la tête, et de faire bouger les doigts en les ouvrant et en les fermant. Malgré leur simplicité, ces petits moyens sont très efficaces pour éviter un œdème et des douleurs pulsatiles.

Pendant les 2 premiers mois qui suivent l'intervention, il faut absolument éviter les manœuvres de force avec la main opérée, telles que dévisser un couvercle, porter un objet lourd, etc. Cette recommandation a pour but de permettre une cicatrisation correcte au ligament qui a été sectionné, et d'éviter des douleurs. Cependant, tous les mouvements des doigts qui ne nécessitent pas de force peuvent - et doivent - être faits : tenir une fourchette, écrire, tenir un objet léger, ouvrir et fermer les doigts, etc. En résumé, il est recommandé au patient de se servir le plus normalement possible de sa main, en la faisant bouger tout en évitant les gestes de force. Cette auto-rééducation est très habituellement suffisante.

Le pansement laisse toujours les doigts libres, pour permettre leurs mouvements. Il est initialement assez volumineux et rembourré (voir photo) pour entraver relativement les mouvements du poignet et éviter ainsi une source de douleur. Il peut être conservé pendant quelques jours puis progressivement allégé et régulièrement changé.

Dans tous les cas, le pansement se salit extérieurement très vite, ce qui est normal et inévitable, preuve que l'on se sert de sa main. En principe, le pansement ne doit pas être mouillé, car cela favoriserait la macération de la peau . En cas de souillure, on peut néamoins laver la zone opérée avec un savon liquide puis ensuite la sécher la main avant de refaire un pansement protecteur de la suture. Le plus simple est d'utiliser un pansement adhésif. Lorsqu'un bandage est utilisé, il est très important de ne pas serrer la bande.


Canal carpien - aspect final post-opératoire
- Fermeture, aspect final post-opératoire


LES COMPLICATIONS


Surtout l'imprévisible et désespérante "algodystrophie", toujours possible dans un pourcentage non négligeable de cas, estimé entre 1 et 5% (voir algodystrophie).

La section incomplète du ligament, avec récidive ou persistance des signes sensitifs et des signes électriques. L'électromyogramme permet de la distinguer d'une compression nerveuse à double étage.

La blessure d'une branche sensitive ou motrice du nerf médian ou du tronc nerveux lui-même. Comme la précédente, cette complication est plus fréquente avec la méthode endoscopique qu'avec la méthode chirurgicale classique.

Adhérences des fléchisseurs des doigts après immobilisation prolongée d'une synovectomie éventuelle associée à la libération nerveuse.

Complications chirurgicales non spécifiques, à vrai dire très exceptionnelles dans cette intervention (hématome, infection, lâchage de sutures, paralysie sous garrot pneumatique).